La déclaration écrite de forum des autochtones AIDB au sein de l'ONU(C'est une déclaration sur la violance faite aux femmes Batwa du Burundi)
Déclaration
Cette déclaration a pour objet d’exposer la violence contre les femmes et les
filles afin d’élaborer les stratégies nécessaires pour éliminer et prévenir toutes les
formes de violence contre les femmes et les filles du Burundi en général et contre
les femmes et filles autochtones batwa en particulier. Nous exposons d’abord les
violations des droits des femmes en évoquant les points suivants :
• La non-participation des femmes batwa aux institutions du Gouvernement
burundais;
• L’absence de scolarisation et l’alphabétisation des filles et femmes batwa;
• La violence basée sur le genre suite à l’impunité du Gouvernement burundais.
Concernant le premier point, nous expliquons d’abord les mécanismes de droit
de participation à la prise de décisions pour les femmes du Burundi. D’une manière
générale, les femmes participent aux institutions publiques selon les principes de
l’accord d’Arusha qui prévoit au moins 30 % de femmes dans les différentes
institutions qui prennent des décisions, pour lutter contre la discrimination à l’égard
des femmes dans leurs droits politiques et civils. Ce pas a été déjà fait, ce qui
permet aux femmes de s’exprimer librement et de participer à la recherche de
solutions aux problèmes de cette catégorie. Cependant, les femmes batwa du
Burundi sont toujours victimes de la discrimination et de la marginalisation car elles
ne sont pas intégrées dans les 30 % au niveau des institutions qui prennent des
décisions au Burundi ni dans la vie du pays. Pourtant, en ses articles 14 et 13, la
Constitution burundaise encourage la participation de tout le monde, sans
discrimination, à la prise de décisions. Il est également mentionné que toute
personne a le droit de participer aux affaires publiques dans l’article 13 de la Charte
africaine des droits de l’homme et des peuples, ainsi que dans la Convention sur
l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. L’absence
de représentation des femmes batwa dans les institutions qui prennent des décisions
a favorisé la continuation de la violence à l’égard de cette catégorie vulnérable de
femmes et de filles; aucune femme ne participe dans les secteurs de la vie nationale
chargés de prendre des mesures sanctionnant les auteurs des actes de violence, dont
harcèlement sexuel, coups et blessures, et mauvais traitement par les maris et par
d’autres couches sociales.
Pour éliminer cette discrimination à l’égard des femmes batwa, il faut :
• Promouvoir au Burundi le programme du Partenariat des Nations Unies pour
les peuples autochtones pour garantir les droits civils et politiques des femmes
et filles batwa;
• La ratification par le Gouvernement burundais du Protocole de Maputo à la
Charte africaine adopté en 2003 relatif aux droits des femmes en Afrique;
• Organiser des séminaires de sensibilisation des femmes batwa afin qu’elles
prennent conscience de leurs droits à la participation aux instances de prise de
décisions;
• Soumettre une proposition de loi au Gouvernement burundais pour les intégrer
à la constitution nationale;
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• Réviser la Constitution burundaise pour intégrer des lois qui garantissent le
droit de participation des femmes batwa dans la prise des décisions;
• Inviter la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples et le
Conseil des droits de l’homme à suivre la mise en œuvre de la Convention sur
l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes au
Burundi;
Concernant l’éducation, nous citons également le nombre très limité de filles
des populations autochtones du Burundi qui terminent à peine leurs études
secondaires, conséquence de la non-scolarisation des filles autochtones du Burundi
faute de moyens financiers de leurs parents. Nous témoignons qu’il n’existe
aujourd’hui aucune fille de la communauté des Batwa ayant terminé l’université.
Nous comptons une quinzaine de filles ayant terminé l’école secondaire et un
taux d’analphabétisme de 80 % parmi les plus de 4 millions de femmes burundaises.
Par conséquent, elles ont beaucoup de problèmes pour gagner leur vie. Selon
l’enquête du 26 octobre 2012, la plupart des femmes et des filles des provinces de
Gitega et Muramvya doivent quémander des vêtements et de la nourriture au
moment de la rentrée scolaire. Suite à de tels problèmes, ces élèves ne terminent
jamais leurs études. Ces filles sont également victimes des mariages forcés et
précoces, qui les rendent plus vulnérables au VIH/sida.
Pour que l’éducation des filles batwa soit possible, le Gouvernement burundais
doit :
• Garantir l’éducation gratuite de l’école primaire jusqu’à l’enseignement
supérieur;
• Promouvoir au Burundi le programme du Partenariat des Nations Unies pour
les peuples autochtones pour garantir le droit à l’éducation;
• Sensibiliser les parents des filles autochtones batwa pour qu’elles aillent à
l’école;
• Prévoir des lois nationales qui sanctionnent pénalement les hommes ou les
garçons qui forcent les filles mineures à se marier;
• Distribuer les vivres aux parents des enfants pour que les filles batwa puissent
aller à l’école.
En ce qui concerne le dernier point du thème, les femmes autochtones batwa
du Burundi sont victimes de la violence liée aux conditions de vie atroces. Elles
manquent de revenus et d’autres ressources nécessaires pour être indépendantes.
Nous affirmons que la plupart des femmes batwa vivent grâce à la poterie
traditionnelle, qui n’est plus rentable aujourd’hui. Certains disent que les milieux
argileux (matière première de la poterie traditionnelle) sont expropriés par les
populations non batwa et d’autres que les marmites fabriquées ne peuvent pas être
vendues à cause de la concurrence de la production industrielle.
La femme de la communauté batwa est incapable de s’acheter ses propres
vêtements; c’est son mari qui s’occupe de l’habiller. Cette situation de subjugation
totale ouvre la porte au harcèlement sexuel par les maris et va jusqu’à la violence
physique en cas de refus des rapports sexuels. Un autre problème est la polygamie :
un homme de la communauté batwa peut avoir deux ou même quatre femmes, ce qui
est contre la législation en vigueur au Burundi. Parfois la première femme est
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chassée du domicile. Dans les années 70 et jusqu’en 1988, certains hommes avaient
jusqu’à 10 femmes. En plus, les mariages batwa restent souvent sans régularisation
officielle, et les maris peuvent menacer leur femme de répudiation et mariage avec
une autre. En plus, les femmes et filles batwa séropositives n’ont pas accès aux
soins de santé et d’appui et, par conséquent, meurent.
Concernant l’accès à la justice équitable, les femmes batwa ne sont pas traitées
sur un pied d’égalité avec les hommes. Selon la coutume burundaise, les femmes ne
peuvent pas prendre la parole en présence d’hommes. Cette tradition est l’émanation
des proverbes qui encouragent la marginalisation et la discrimination contre les
femmes. Par exemple, il existe un proverbe qui dit que la poule ne chante pas quand
le coq est présent. Il n’existe pas de lois qui protègent les femmes autochtones
batwa contre tous ces maux.
Pour éliminer et prévenir ces actes de violence, il faut :
• Prendre des mesures adéquates, en votant des lois au Parlement qui pénalisent
les maris présumés auteurs des actes de violence à l’égard des femmes batwa;
• Reconnaître l’égalité devant la loi entre les femmes batwa et les hommes ainsi
que les autres composantes de la société burundaise;
• Intégrer dans la législation burundaise des mesures pouvant promouvoir le
développement économique et socioculturel des femmes batwa;
• Mettre en œuvre le Partenariat des Nations Unies pour les peuples autochtones
au Burundi afin de sensibiliser et former les femmes batwa à d’autres métiers
et activités entrepreneuriales à travers les organisations autochtones;
• Organiser des séminaires de sensibilisation sur le VIH/sida qui est aujourd’hui
un fléau méconnu par les femmes batwa;
• Organiser des séminaires de sensibilisation des hommes batwa pour qu’ils
cessent la pratique de la polygamie, facteur de la propagation du VIH/sida
dans la minorité batwa;
• Approvisionnement en vivres par le Programme alimentaire mondial pour
faciliter la subsistance des femmes batwa lors des cours de formation sur
l’entrepreneuriat et d’autres métiers.